• 15 octobre 2024

Nous à l'ONU et l'ONU chez nous

Si dans la partie occidentale du continent européen le printemps commence officiellement le 21 mars, dans l’Est de l’Europe il arrive le 1 mars. Nous nous réjouissons avant les autres des perce-neiges et des jonquilles et nous sommes parmi les rares peuples qui marquent l'événement avec le Mărțisor – ce symbole du printemps devenu patrimoine de l’UNESCO.

Chez nous le printemps amène aussi d’autres journées importantes qui sont célébrées avec enthousiasme. L’un de ces événements et également l'un des jours les plus importants de l'histoire de notre pays – son adhésion aux Nations Unies, qui a eu lieu le 2 mars 1992.

Au début d’un nouveau millénaire et après plusieurs décennies d'indépendance déclarée et de souveraineté recherchée, nous nous rendons compte que la construction du pays est encore en chantier. En mars, il y a vingt-huit ans, lorsque la Moldavie a rejoint la famille des Nations Unies, étions-nous conscients de ce pas ? La population a-t-elle été informée de cette décision avant, pendant et après l’événement ? De nombreuses questions exigent des réponses permettant de mieux comprendre ce qui s’est passé le 2 mars 1992 et par la suite.

Aujourd'hui, nous devons nous poser une question simple : qui sommes-nous aux Nations Unies et dans les autres organisations internationales? Quel rôle y joue la Moldavie? Quelle est sa contribution? Il ne s’agit pas ici des programmes financés par divers organismes et organisations, ni de l’aide qui est accordée dans certains domaines, ni même des diverses conventions signées et ratifiées. La question n'est pas ce que l'ONU fait chez nous, mais ce que nous faisons à l'ONU. Si, le 2 mars, on posait spontanément dans tous les établissements d'enseignement, des écoles aux universités, la question de savoir ce que signifie l’ONU, les réponses, pour autant qu’il y en ait, nous surprendraient sans doute ou nous rendraient même tristes. Qui se souvient, en effet, du 2 mars 1992?

En raison de son système politique, la Suisse est le pays qui a le plus longtemps débattu de la question de son adhésion à l'ONU. Dès 1919, lors de la création de la Société des Nations, la ville de Genève a obtenu le droit d'accueillir l'organisation nouvellement créée. Un an plus tard, c’est au suffrage universel (56%), que l'adhésion de la Suisse à la Société des Nations a été acceptée par le peuple helvétique. La jeune organisation n’a cependant pas résisté bien longtemps aux tensions internationales qui ont provoqué la Seconde Guerre mondiale. En 1945, les négociations en vue de la création d’une nouvelle forme de multilatéralisme ont abouti à la création de l’Organisation des Nations Unies, dont le siège européen se trouve à Genève.

Les pays vainqueurs de la guerre ont dicté les règles du jeu. 51 États sont devenus les fondateurs de la nouvelle plateforme de négociations et de débats. Bien qu'elle héberge le siège européen de la nouvelle organisation sur son territoire, la Suisse ne faisait pas partie des pays membres. En 1986, le peuple suisse a été appelé à se prononcer à propos de l'adhésion du pays à l’ONU. L’échec fut net avec 75% des voix contre. Ce n'est qu'en 2000, à la suite d’une Assemblée générale des États membres organisée à Genève plutôt qu’à New York, qu’on a recommencé peu à peu à parler de l'adhésion de la Suisse à l'ONU. Le 3 mars 2002, une initiative populaire lancée à ce sujet a été acceptée par 54,6% des voix. Exactement 10 ans après l'adhésion de la République de Moldavie, à la suite de multiples campagnes d'information et au prix de nombreux efforts et discussions, le pays hôte du plus important bureau des Nations Unies en Europe, est devenu membre à part entière de l’Organisation. Le travail accompli depuis a porté ses fruits. Ainsi la victoire durement gagnée a rendu la présence d’un petit pays, la Suisse, bien visible: elle négocie, cherche, s’implique et trouve des solutions. Conclusion: même un petit pays peut se donner le temps de réfléchir avant de prendre une telle décision et jouer un rôle important une fois que le pas est franchi.

En 2020, alors que nous célébrons les 75 ans de la création des Nations Unies, petits et grands pays sont invités à participer à un dialogue mondial, ce qui offre une possibilité rare voire unique de contribuer à l’adoption d’une nouvelle vision de cette construction collective. À l'heure de la mondialisation, lorsque la planète semble rétrécir, les petits pays peuvent s'exprimer, la société civile peut venir avec des idées nouvelles et nos jeunes doivent donc se lancer dans la construction de l'avenir. La circulation des idées et l'accès à l'information s’accommodent mal de l'ignorance et de la non-participation.

L’ONU existe, nous en faisons partie: à nous aussi d’en tirer le meilleur parti possible.

 

Genève,
Margareta Donos

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